Le Vélodrome devance le Parc des Princes et Geoffroy-Guichard au premier classement des stades où il fait bon vivre une soirée de Ligue 1.

L'idée était toute simple : un stage en immersion dans les stades de Ligue 1, une plongée façon supporter incognito pour vivre au plus près l'expérience client, comme on dit dans les cours de marketing, une réalité dont la tribune de presse ne rend compte que partiellement. Huit journalistes - un seul de la rubrique foot - non attachés au club résident des stades qu'ils visitaient ont donc sillonné la France du Championnat du 9 mars au 20 avril.
La feuille de route ? Limpide : se fondre dans la masse, acheter une place en latérale, tribune opposée à la présidentielle, prendre le tram, le bus et minuter l'accès au stade, apprécier la fluidité des fouilles et des dispositifs de sécurité, profiter du quartier et de ses animations avant et après les matches, jauger le confort du siège, l'amplitude de la vue, la vitesse du wifi et la richesse des services, goûter l'ambiance, les chants, le match, s'enflammer ou pester à l'unisson du stade, faire le ravito à la mi-temps, estimer la variété de la carte, le croquant de la frite et la fraîcheur du liquide concomitant, patienter (ou pas) aux toilettes, évaluer la propreté et la beauté des lieux, les efforts environnementaux, tester la rapidité à quitter l'enceinte et, in fine, soupeser le porte-monnaie à l'issue de la journée. Bref, vivre un match de L1 comme un spectateur lambda.
Évidemment, découvrir Geoffroy-Guichard un soir de derby brûlant le 20 avril (victoire de Saint-Étienne 2-1) donne une autre ampleur à sa soirée qu'assister au 0-0 de Brest contre Reims le dimanche après-midi du 15 mars, dans les travées vétustes de Francis-Le Blé. Pour tenter de minorer ces effets de distorsion, consigne avait été passée de discuter avec les voisins de siège, afin de dépasser la seule expérience d'un moment. Et surtout, tels des correcteurs du bac de français, les huit routards de L1 se sont soumis à une réunion d'harmonisation des notes, riche, drôle et passionnée, afin de confronter leur subjectivité à celle de leurs collègues, de défendre leurs arguments et de déterminer ensemble leur échelle de valeurs communes.
Méthodologie
Le classement des stades de L1 a été établi d'après des critères prédéfinis, notés de 1 à 10, pour une note finale sur 100.
Ambiance et ferveur (coefficient double)
(Chants, tifos, impact sonore, taux de remplissage...)
Confort et visibilité
(Qualité et ergonomie des sièges, espacement, visibilité, couverture en cas d'intempéries...)
Accessibilité
(Transports en commun, parkings, durée des trajets, fluidité des entrées/sorties)
Expérience économique
(Prix moyen des billets, abonnements, restauration, transports...)
Offre de restauration
(Variété et qualité des stands, temps d'attente aux buvettes...)
Expérience pré et post-match
(Dynamisme du quartier, animations sur le parvis et autour du match...)
Innovation et modernité
(Qualité du wifi, écrans géants et animations interactives, services digitaux, espaces dédiés aux enfants...)
Histoire et prestige
(Évènements tous sports accueillis par le stade, palmarès du club résident, valeur architecturale et patrimoniale...)
Environnement et propreté
(Développement durable, transports doux, initiatives écologiques, propreté du stade et des sanitaires...)
Les vieux stades (bien) rénovés en haut du classement
Tout ceci débouche donc sur ce premier classement des stades où il fait bon vivre une soirée de Ligue 1. Il accorde une prime à l'ambiance (coefficient doublé), car quand on va au stade, c'est avant tout pour y partager une émotion commune. Ça profite donc aux enceintes qui ont vécu une belle saison de leur club - au hasard, Strasbourg, aspirant européen surprise, ou Auxerre, joyeux promu - et pénalise celles qui ont vu la saison défiler dans la tiédeur du ventre mou (à Rennes, par exemple) ou la colère de la descente programmée comme à Montpellier. Logique que ce qui se passe sur la pelouse influe sur le ressenti des travées.
Au final, parce qu'il accueille le seul - pour quelques jours encore ? - club français victorieux de la Ligue des champions, parce qu'il rayonne dans la ville, à portée d'une journée à la plage, parce qu'il bout (parfois jusqu'au déraisonnable) d'une énergie unique sur laquelle on a su poser un toit magnifique, parce qu'il est moins cher que le Parc des Princes aussi (l'absence en Coupe d'Europe y a contribué sûrement), l'Orange Vélodrome domine ce classement assez serré, d'un souffle devant le Parc dont la fièvre monte de plusieurs crans en Ligue des champions versus les joutes domestiques.
Et le Chaudron stéphanois complète un podium de sièges historiques. Instructif d'ailleurs que le palmarès donne l'avantage aux vieux stades (bien) rénovés et modernisés face à des enceintes plus récentes, ultra-fonctionnelles mais qui, excentrées, peinent à faire le match des âmes comme le Groupama Stadium de l'OL ou l'Allianz Riviera de Nice.
Notre classement des stades de L1
- Orange Vélodrome (Marseille) : 76 points
- Parc des Princes (Paris-SG) : 75 pts
- Geoffroy-Guichard (Saint-Étienne) : 74 pts
- Bollaert-Delelis (Lens) : 73 pts
- Groupama Stadium (Lyon) : 73 pts
- La Meinau (Strasbourg) : 70 pts
- Roazhon Park (Rennes) : 68 pts
- Stadium (Toulouse) : 68 pts
- Decathlon-Arena - Pierre-Mauroy (Lille) : 67 pts
- La Beaujoire (Nantes) : 66 pts
- Allianz Riviera (Nice) : 63 pts
- L'Abbé-Deschamps (Auxerre) : 62 pts
- Océane (Le Havre) : 57 pts
- Francis-Le Blé (Brest) : 53 pts
- Auguste-Delaune (Reims) : 51 pts
- Raymond-Kopa (Angers) : 51 pts
- Louis-II (Monaco) : 50 pts
- La Mosson (Montpellier) : 46 pts
Les bonnes surprises viennent de la Meinau, pourtant en rénovation, du Stadium de Toulouse où, depuis la remontée, on s'échine au travers de gros efforts d'animation autour des matches à sortir de l'ombre tutélaire du rugby, ou de l'Abbé-Deschamps, si on veut vivre une belle après-midi à l'ancienne.
Le fond de la classe appartient à des stades et des clubs qui ont lutté en fond de cale, hormis la sempiternelle exception monégasque. Mais il n'en est qu'un qui n'obtient pas la moyenne : la Mosson, que Montpellier aimerait quitter lui aussi. Relégation pour tous.