Le Stade Rennais va défier l’AC Milan, jeudi 15 février en barrage aller de Ligue Europa. Avant ce match de gala pour le SRFC, Ouest-France a convié l’attaquant de Milan et des Bleus Olivier Giroud à converser avec Joël Thibault, son pasteur installé… à Rennes. Il a été évidemment question du rapport de Giroud avec le club breton, qu’il avait déjà croisé avec Chelsea il y a quatre ans en Ligue des champions.
Les réunir s’est imposé comme une évidence, dès le jour du tirage au sort où ils n’ont d’ailleurs pas manqué d’échanger.
D’un côté, Olivier Giroud, l’arme offensive de l’AC Milan. De l’autre, Joël Thibault, pasteur protestant évangélique à Rennes, de l’église Espérance des nations, dont les cultes sont célébrés dans le bâtiment anciennement occupé par Tupperware.
Ce match de gala entre l’AC Milan et le Stade Rennais, c’est aussi celui des retrouvailles entre l’attaquant des Bleus et son guide spirituel. Depuis 2016 et une rencontre dans le cadre verdoyant de Clairefontaine, le second accompagne le premier dans sa foi. Au fil des années et des échanges, ils ont noué une solide amitié, partagé ensemble des combats en faveur des chrétiens persécutés dans le monde.
Avant ce match aller des 8es de finale à San Siro, Ouest-France a convié les deux hommes par visio, dans une conversation complice. Un pont entre Rennes et Milan.
Olivier, depuis le tirage au sort, le rendez-vous est pris avec votre pasteur rennais ?
On a un peu échangé par rapport à ça, on se verra je pense la veille du match… mais on va mettre notre amitié de côté sur ce match-là, parce que je sais qu’il supporte Rennes (sourire)… en tout cas, ça fera plaisir de revenir en France, et Rennes ça reste un bon souvenir pour moi avec Chelsea (3-0 à Stamford Bridge en novembre 2020, puis succès 2-1 au Roazhon Park en phase de poule de Ligue des champions).
Joël Thibault : je ne veux pas mettre mes paroissiens ou les Rennais à dos, mais je ne suis pas supporter du Stade Rennais !
Tu ne supportes même pas le club de la région ? (rire)
"Ce soir-là, au Roazhon Park, j’y avais cru…"
Tu sais que je suis Angevin, je milite pour le retour du Sco en L1 ! Et j’ai été formé quand même à Nantes…
Ah oui, donc tu ne peux pas te dire Rennais ! (sourire)
(Joël Thibault embraye) mais c’est tout le miracle, qui me permet d’être pasteur à Rennes et d’y avoir même baptisé un joueur du FC Nantes dans notre église ! Je suis pour la paix et la fraternité (sourire), mais je suis Français et forcément un peu pour le club français, même si je te supporterai aussi… Cela sera un sentiment particulier ! La dernière fois ici, contre Chelsea, on avait pu passer un bon moment avant le match, car on n’avait pas le droit d’aller au stade à l’époque… D’ailleurs que retiens-tu de ce match au Roazhon Park en période de Covid ?
(Giroud) : ce n’était pas la plus belle période, sans la vibration du public, ce qui nous transcende… Si je continue le foot, c’est aussi pour ressentir ça. Ce soir-là, je n’avais pas débuté le match, j’étais rentré et j’avais donné la victoire à l’équipe. À nouveau un signe, ce qui fait un peu la spécificité de ma carrière… Dos au mur, chaque difficulté est fondatrice, je le crois vraiment… Et ce soir-là, j’y avais cru. On avait gagné sur le fil, le Stade Rennais nous avait fait forte impression, avait joué son va-tout. Sur mon but, le ballon monte à dix mètres de haut, je vais au duel, j’ai beaucoup de réussite. Même si cette année, Rennes est moins bien que les années d’avant en championnat, il faut se méfier de cette équipe, qui a beaucoup de bons jeunes et un bon coach.
Avec Steve (Mandanda), c’est une longue histoire…
Steve Mandanda, ton ancien coéquipier en équipe de France, va beaucoup prier pour que tu ne marques pas ?
(Sourire) je ne sais pas, mais que le meilleur gagne ! Steve, c’est une longue histoire. J’avais marqué mon premier but en pro avec Grenoble contre lui, quand il était au Havre. On a partagé onze années ensuite avec les Bleus, et on s’écrit de temps en temps. Je l’apprécie beaucoup, on partage certaines valeurs. Ce qu’on a vécu ensemble, avec notamment le titre de champion du monde 2018, fait aussi de nous des frères dans le sport. Et lui non plus ne lâche rien, il a même prolongé jusqu’en 2025 !
C’est un avantage parce que tu connais bien ses failles, ou une petite pression ?
Cela ne change pas tant que ça. Sauf peut-être s’il y a un penalty, car j’en ai raté quelques-uns récemment. Et même à 37 ans, même quand tu relativises, que tu évites de lire les réseaux sociaux ou ce qui peut se dire dans les médias, dans l’inconscient ça travaille, ça peut être dur… Un champion, pour aller loin, doit être capable de faire son autocritique soi-même. Après, j’ai déjà joué contre des potes, Costil, Lloris, et réussi à marquer, donc ce ne sera pas un frein. Mais c’est cool !
"Il y a eu un intérêt de Rennes, mais revenir en France n’est pas dans mes projets"
Comme toi, Mandanda joue les prolongations dans sa carrière…
C’est d’abord une question d’approche mentale. L’envie de continuer à se surpasser. J’en avais aussi parlé avec Ibrahimovic (devenu conseiller spécial de l’AC Milan), qui a joué jusqu’à 41 ans… Si tu as envie et que ton corps le permet, il n’y a pas de limite. Mais je ne veux pas non plus faire l’année de trop. Et Steve, encore plus pour un gardien, peut encore continuer.
Tu sais que tu es très apprécié en Bretagne, notamment par la famille Pinault qui avait essayé de t’approcher il y a deux ans… Une église et un pasteur t’attendent aussi à Rennes, pourquoi tu n’as pas signé au Stade Rennais ?
(Rire) J’ai toujours apprécié Monsieur Pinault (François-Henri). On a même été un temps voisin à Londres, et il m’avait même invité un jour à dîner chez lui, on avait sympathisé avec nos épouses aussi. Il y a eu un intérêt de Rennes, et cela fait toujours plaisir aussi ce capital sympathie que j’ai en France, d’y être reconnu. Mais ce n’est pas dans mes projets d’y revenir, en tout cas, j’aime la Bretagne !