Pour poursuivre ce focus sur le Stade Rennais, j'ai eu l'immense honneur d'interviewer l'un des plus grands buteurs de l'histoire du club, Daniel Rodighiero ! Il est revenu avec moi sur son passage chez les bretons.
Foot Multiple : Bonjour Daniel. Peux-tu nous expliquer quels souvenirs gardes-tu de ton passage au Stade Rennais ?
Daniel Rodighiero : "Pour revenir sur mon passage au Stade Rennais et sur mon arrivée en 1964, je dois tout d’abord souligner que cela s’est fait après que Jean Prouff m’ait lancé au Red Star en deuxième division en 1958. Or, le Red Star fut rapidement interdit d’évoluer au niveau professionnel, donc j’ai ensuite suivi Jean Prouff à Caen, avant de revenir au Red Star puisque j’étais sous contrat là-bas. Pendant trois saisons, j’ai alors été régulièrement décisif, et cela a attiré l’œil d’Antoine Cuissard, l’entraîneur du Stade Rennais, qui m’a donc fait venir au club.
Or, rapidement, il fut viré et c’est Jean Prouff, encore lui, qui est ainsi devenu mon entraîneur. Il me connaissait, me faisait confiance, donc c’était un véritable bonheur pour moi d’évoluer à nouveau sous ses ordres.
Néanmoins, au début, on ne va pas se le cacher, cela n’a pas toujours été facile pour moi. En effet, les premiers mois, les supporters rennais me surnommaient « Rodizéro » car je n’étais pas performant d’emblée. Heureusement, rapidement, j’ai finalement enchaîné les buts, et on m’a donc appelé « Monsieur 20 buts » car j’avais l’habitude de marquer toujours vingt buts par saison.
J’ai ensuite passé plus de six saisons au Stade Rennais qui furent, de loin, mes meilleures années, sur le plan footballistique et personnel. C’était un véritable bonheur de vivre là-bas. Lorsque j’y repense, je me dis que notre saison 1964/1965 était totalement incroyable. Selon moi, le club n’a jamais eu une équipe aussi forte depuis cela. On avait effectivement gagné la Coupe de France, et on avait terminé seulement à cinq points du titre de champion de France.
Ainsi, cette saison, et surtout cette victoire en Coupe de France, cela reste clairement le plus beau souvenir de ma carrière. J’ai marqué onze buts en sept matchs. En huitième de finale, j’ai notamment inscrit cinq buts contre Saint-Quentin. Ensuite, en quart on élimine Marseille, en demi on sort le grand Saint-Etienne de l’époque, et en finale on bat Sedan 3-1 lors d’un match rejoué où j’inscris un doublé. Ce fut une aventure fabuleuse qui restera gravée à vie dans ma tête, vraiment. La soirée qui a suivi cette finale au Parc des Princes était assez incroyable aussi et notre retour à Rennes, avec l’accueil de milliers de bretons, c’était tout simplement indescriptible.
Je suis donc très fier d’avoir marqué le club et d’avoir pu contribuer au premier titre du Stade Rennais. De même, je suis heureux d’être, encore à ce jour, le deuxième meilleur buteur de l’histoire du club avec 125 buts. Je suis derrière Jean Grumellon, mais il est resté plus longtemps, a plus joué en D2, et à une autre époque où il y avait bien plus de buts, donc je pense que l’on peut même me mettre à sa hauteur (rires). Plus sérieusement, c’est une grande fierté. Faire partie de l’histoire du club en ayant été un acteur majeur de six très belles saisons du Stade Rennais, je ne peux qu’en être heureux.
Mon passage au club est donc un souvenir fantastique, même si j’aurais préféré que cela se termine autrement. En effet, sur la fin, Jean Prouff ne me faisait plus forcément confiance, alors que je le considérais comme un père, et je suis donc parti à Valenciennes avec un goût amer. Malgré cela, je ne retiens évidemment que le positif. C’est le club où j’ai pu me révéler aux yeux du football français, où j’ai connu des matchs incroyables, et où j’ai pu obtenir mes sélections en Equipe de France. Ainsi, il restera toujours dans mon cœur".