L’éclosion de Désiré Doué pose la question de comment conserver les jeunes joueurs formés au club. C’est l’un des défis de la nouvelle ambition du club breton.
C’est un instant de grâce, une reprise fouettée qui part se loger en pleine lucarne du but de Lafont. Toute la magie du foot incarnée dans la pureté de ce geste de Désiré Doué qui retourne le Roazhon Park et scelle le derby contre Nantes (3-0).
Un troisième but en Ligue 1 pour le joueur de 17 ans formé au club, le deuxième d’une semaine presque parfaite. Presque, car tout le monde a en mémoire son entrée en jeu ratée face à Kiev, où son zèle individualiste a mis en colère Bruno Genesio et les supporters, avant qu’il ne délivre tout le monde par son but.
Le coach a eu une discussion avec lui "pour qu’il joue plus simple, quand il doit jouer plus simple, précise Genesio. Il faut qu’il garde cette qualité de percussion, de puissance sur les premiers appuis, de dribbles. Et savoir quand il doit faire ça et quand il doit jouer à une ou deux touches. Comme il est intelligent et bien entouré, il comprend vite. Et ce soir (dimanche), il a encore éclaté le stade avec un but qui résume le joueur qu’il est et qu’il peut devenir."
Une étoile parmi les étoiles, car en quelques semaines, toute la planète foot a fait connaissance avec ce génie nommé Désiré. Impossible de ne pas encenser ce talent précoce, ce nouveau bijou de la formation rennaise. La presse étrangère s’y met aussi. Attention, donc, à l’emballement si propre au foot. "C’est maintenant à lui et son entourage de prendre ça avec beaucoup de recul et de mesure. Je ne suis pas trop inquiet là-dessus."
Le SRFC à la croisée des chemins
C’est aussi au club d’être vigilant. Mais au moment où les discussions débutent pour une potentielle prolongation (il est en contrat jusqu’en 2024), difficile de mieux gérer l’éclosion du joueur. Il a déjà onze apparitions avec les Rouge et Noir, dont trois titularisations. Le manque de temps de jeu ne sera pas un argument dans la négociation.
Mais, au moment où beaucoup de grands clubs ont déjà un œil sur lui, Désiré Doué incarne la croisée des chemins où se situe le Stade Rennais. Il est à la fois un cas d’école et un moment charnière pour le club breton. Ce SRFC ambitieux doit réussir à conserver cette étoile une ou deux saisons de plus, pour démontrer qu’il a vraiment changé de galaxie. Ce qu’il n’a pas toujours réussi à faire jusque-là avec ses jeunes cracks : Diop, Dembélé, Rutter, Camavinga ou Mathys Tel, qui ont tous succombé aux chants des sirènes des plus grands clubs européens et de leur puissance financière avec laquelle le Stade Rennais ne peut lutter, toute propriété de François Pinault qu’il est.
Mais cela doit changer selon Bruno Genesio, qui a fait une mise au point très intéressante, dimanche, après la victoire dans le derby. "Je trouve aussi que c’est un bon message à tous les autres jeunes du club, il y en a qui jouent, d’autres qui vont arriver. Ça montre qu’il y a un projet au Stade Rennais pour les jeunes joueurs. Et j’aimerais que ce projet ne soit pas seulement une volonté de briller ici, pour aller ailleurs au bout de six mois ou un an, mais pour s’inscrire dans le projet du club. Je pense qu’il y a un projet à mener avec la formation […], ça doit être la politique du club dans les années à venir de fidéliser nos jeunes joueurs. Je ne dis pas qu’ils vont faire toute leur carrière ici. Mais il doit y avoir un vrai projet identifié sur les jeunes."
Plus qu’un appel du pied d’un coach qui a toujours été proche de la formation et accompagné nombre de talents, dont un certain Karim Benzema. "C’est le message global que j’ai envie de faire passer aux jeunes joueurs mais aussi au club parce que, nous, on doit avoir cette volonté d’être plus exigeant, plus ferme avec nos jeunes avec ce qu’ils veulent faire ici."