Tout avait pourtant bien démarré, avec un carton plein contre Lyon, 3-0 mais le coach avait prévenu, l’histoire d’un match n’allait pas balayer le chantier immense se présentant au staff pour cette saison. Avec 18 départs et 12 arrivées, pouvait-il en être autrement
A l’époque des jeux du cirque, le gladiateur, genou à terre, savait son sort remis entre les mains d’un public sans pitié, souvent assoiffé de sang et de larmes. Un pouce vers le bas et c’était ainsi la fin, sans pitié ni discernement, pour le plaisir de venir épancher la déception du spectateur d’avoir vu le combat perdu…
Les réactions lues et entendues ici et là au sujet des joueurs, un peu, mais surtout de Julien Stéphan, donnent cette impression. Stratège adulé hier et porté au pinacle, il est aujourd’hui la cible – facile – des critiques dans le meilleur cas, quolibets et injures dans d’autres. La critique est aisée mais l’art est difficile.
Précipitation rime rarement avec bonne solution
Comment en effet, imaginer un instant un système tactique rodé, efficace et séduisant, tant qu’à faire, au bout de trois matchs et à peine un mois de vécu commun pour un groupe chamboulé de la sorte, avec une remise à zéro des compteurs de A à Z ? Si Julien Stéphan, qui reste sur une série très compliquée (4 victoires seulement sur les 14 derniers matchs) est l’entraîneur qui doit trouver les solutions et impulser une dynamique, il n’est pas pour autant magicien, même avec la baguette magique à transferts de Frederic Massara.
Comment ces deux-là collaborent-ils, d’ailleurs, au quotidien ? Une question à laquelle la gestion de la situation actuelle par le nouveau directeur sportif du SRFC va répondre, avec deux options possibles : la patience et le temps donnés au technicien rennais pour identifier son onze de départ et lui rendre efficacité, pouvoir de séduction et confiance ou la pression et peut-être même, la hâte de rapidement se tourner vers un autre profil.
Le nom de Stefano Pioli a évidemment été largement « balancé » ici et là mais Julien Stéphan tient en l’actionnaire un soutien de poids et l’ancien directeur sportif du Milan AC ne sait que trop bien que la précipitation rime rarement avec bonne solution dans le football. Comme l’ont démontré les trois premiers matchs, la défense est à repenser, avec des automatismes à faire naître entre Leo Ostigard et, probablement, Mikayil Faye, amené à prendre la place de Christopher Wooh à court ou moyen termes.
12 arrivées et autant d’automatismes à trouver
Sur les côtés, une vraie concurrence sera de mise entre Lorenz Assignon, finalement resté et très convaincant, et Hans Hateboer, tandis qu’à gauche, Adrien Truffert doit retrouver la grande forme et s’éviter le coup de mou après un bon tournoi olympique. Alidu Seidu sera là pour le suppléer, avec panache, dans une défense qui devrait rester à quatre, bien que les profils des latéraux puissent donner l’envie d’un système à trois centraux et deux pistons. Piste, pour le moment, non exploitée par le coach.
Au milieu, en revanche, le doute et les interrogations sont légion, notamment en vue d’association vers l’avant. Deux récupérateurs, un meneur de jeu derrière deux attaquants ou deux ailiers et une pointe, comme les recrutements de Jota, Gronbeak et Gomez pourraient l’indiquer, avec Arnaud Kalimuendo à la finition pour enfin sortir sa grosse saison en « Rouge et Noir », ou Amine Gouiri, lui aussi attendu, le chantier est vaste !
Avec désormais plusieurs « box to box » à disposition peut-être trop (Matusiwa, Santamaria, Kamara, Ahamada), Julien Stéphan a l’embarras du choix. Encore faut-il faire le bon et mettre aussi en valeur des joueurs capables de manipuler le ballon, de transpercer une défense avec une passe bien sentie ou d’aérer le jeu. Jota, aujourd’hui trop juste pour débuter, sera-t-il prêt d’ici à fin septembre et amènera-t-il surtout ce talent brut créatif semblant faire défaut dans les différents profils ? Albert Gronbeak, brillant contre Lyon, tiendra-t-il physiquement face à des formations plus fortes que le faible OL de Pierre Sage ?
Engranger avant Paris et retrouver la confiance
Les questions à la sortie des deux revers successifs à Strasbourg et Reims, deux équipes qui ne seront pourtant probablement pas dans le top 8, interroge. Errements défensifs coupables et sanctionnés immédiatement, déficit à la création et révolte bien trop timide laissent à penser que le ressort psychologique, s’il n’est peut-être pas encore cassé, peine à impulser une meilleure tendance.
Avec les réceptions de Montpellier puis Lens et un déplacement à Paris en septembre, le Stade Rennais sait qu’il doit engranger à domicile, sous peine d’être déjà largué par le train de devant, qui file d’entrée à vive allure à l’image de Monaco, Marseille, Lille et Lens notamment, derrière l’intouchable PSG. Avec les nouvelles coupes d’Europe et leur rythme effréné, certains laisseront des plumes en route mais le Stade Rennais doit aussi forcer et écrire sa destinée sans s’occuper d’autrui. Le monde du foot va vite, est fou, mais la réalité elle, reste froide et implacable.
Dans un contexte financier global morose pour le ballon rond, le Stade Rennais doit retrouver le plaisir, les résultats et emmener avec lui un public pour le moment perdu et dubitatif, qui ne reconnaît plus vraiment l’équipe qui l’a tant fait rêver ces dernières années. S’il n’a pas encore définitivement choisi de mettre le pouce vers le bas, ses doutes et inquiétudes, légitimes au vu des contenus, méritent des réponses claires par les intentions et les résultats. Julien Stéphan et ses hommes savent ce qu’il leur reste à faire…