Invité de la matinale de BFM Business, l'ancien directeur du pôle Sports de Canal+ est revenu sur les négociations de la Ligue de football professionnel afin de trouver un diffuseur à partir de la saison prochaine.
Qui diffusera la Ligue 1 l'an prochain jusqu'en 2029? La question n'est toujours pas tranchée et la Ligue de football professionnel (LFP) continue d'âpres négociations avec différents acteurs pour trouver son prochain diffuseur, quelques semaines avant la reprise du championnat de France, le 16 août. L'ancien directeur du pôle Sports de Canal+ Cyril Linette était présent vendredi matin sur le plateau de Good Morning Business pour évoquer la situation qui pourrait se solder par la création d'une chaîne de télévision par la LFP.
"Lancer une chaîne est la solution qui obligerait probablement à passer par le point le plus bas au niveau des montants, relève-t-il. Ce serait donc la solution de crise la plus aiguë pour le foot français."
Mais l'ancien directeur général de L'Équipe perçoit des vertus à travers une telle option. "Quand vous êtes en crise, ça veut dire que vous redémarrez de zéro, vous baissez vos charges, rappelle-t-il. Une entreprise en crise peut aussi se recentrer, revenir sur son 'core business', s'occuper des clients les plus fidèles et affirmés qu'elle a déjà, arrêter de concourir à l'international qui est un vœu pieux. La solution de passer par une chaîne est la plus compliquée d'un point de vue financier, mais pas forcément la plus mauvaise."
Le produit réel ne vaut pas un milliard d'euros
Dans tous les cas, l'ancien directeur général de L'Équipe assure qu'"il y aura du foot pour les fans de foot à la rentrée sur l'un des opérateurs" mais "probablement à un prix beaucoup plus bas que celui qui avait été imaginé."
"L'erreur historique des dirigeants du football français est d'avoir toujours pensé qu'ils pouvaient fixer les prix."
Cyril Linette rappelle ainsi que la Ligue 1 avait davantage une valeur stratégique historiquement. "Dans les années 2010, quand Canal achète très chers les droits du football, ce n'est pas parce qu'il va gagner de l'argent sur le foot, en réalité il en perd, explique-t-il. C'est parce qu'il prive son concurrent du football donc c'est un choix stratégique de Canal, mais que le football français prend comme une forme de valorisation dans l'absolu. Lorsque cet aspect compétitif, qui consiste à priver l'adversaire d'un droit, est beaucoup moins prononcé, on revient à la valeur du produit. Or, le produit réel ne vaut pas un milliard d'euros."
Canal s'est réorienté vers les coupes d'Europe ces dernières années
Cette valorisation est d'autant plus inconcevable à l'heure actuelle qu'après le détachement de la LFP, Canal+ s'est orienté vers les droits des coupes d'Europe dans lesquels elle a investi près d'un demi-milliard d'euros ces dernières années: "C'est colossal, c'est quasiment le montant qu'investissait précédemment Canal dans la Ligue 1." Pour autant, l'ancien directeur du pôle Sports de Canal+ estime que son ancienne maison reste intéressée par l'intégration de matchs de Ligue 1 dans son catalogue, notamment les rencontres du dimanche soir alors que l'Olympique de Marseille ne disputera pas de compétitions européennes la saison prochaine.
L'ex-directeur général de L'Équipe qualifie Canal d'"incontournable", que ce soit dans la catégorie des diffuseurs ou celle des distributeurs, et laisse sous-entendre que c'est une option préférable à Amazon qui était le principal diffuseur de la Ligue 1 la saison passée: "une erreur stratégique colossale" à ses yeux. "Quand on est à la tête d'un business aussi important que le foot, on ne se met pas entre les mains d'une entreprise de Seattle pour laquelle la division contenus est totalement anecdotique, déplore-t-il. Imaginez Amazon, géant mondial du e-commerce et de l'industrie informatique: que pèse la division contenus Prime Video dans Amazon? C'est un petit complément pour les abonnés en fait."
"Que pèse la France pour le grand Amazon et que pèse le foot français à l'intérieur du territoire français pour Amazon? C'est une ligne qui peut être rayée d'un trait de plume dans une réunion financière. Il n'y a pas eu besoin de Jeff Bezos pour décider qu'on pouvait continuer le foot français, mais pas très cher."